Six membres d'un réseau de passeurs ont été condamnés dans le nord de la France à des peines allant de deux à cinq ans de prison. Ils acheminaient du matériel nautique depuis la Turquie, pour faire passer des migrants au Royaume-Uni par la Manche.
Les trafiquants à la tête de ce réseau de passeurs avaient dégagé un chiffre d’affaires de plus d’1,6 million d’euros. Ils multipliaient le nombre de bateaux en partance vers les côtes britanniques et surchargeaient ces canots pneumatiques de mauvaise qualité pour gagner un maximum d’argent, selon les enquêteurs français qui les ont arrêtés fin octobre près de Douai, dans le nord de la France.
Le chef du réseau, Alan Mohammad Ali, est un Irakien de 33 ans, indique la Voix du Nord, qui rapporte l’affaire. Il a été condamné, mardi 7 février, à cinq ans de prison ferme et sera expulsé du territoire français à l’issue de sa peine.
L’homme s’était associé à Naweed-Ullah Safi, "chargé de trouver les migrants à faire passer". Cet Afghan de 26 ans, travaillait dans un kebab de Douai lorsqu’Alan Mohammad Ali l’a recruté. Les enquêteurs ont découvert qu’il touchait 1 500 euros par bateau mis à l’eau. Il a écopé de deux ans de prison ferme et sera interdit de territoire français également.
Deux ans de prison pour les livreurs de bateaux
Quatre autres hommes, deux Irakiens, un Soudanais et un Français, sont soupçonnés d’appartenir à ce trafic. Alan Mohammad Ali et Naweed-Ullah Safi avaient en effet recruté des "hommes de main pour conduire les véhicules, charger le matériel à destination de la côte". Ils ont tous été condamnés à deux ans de prison ferme.
Tous ces hommes étaient motivés par "l’appât du gain", a estimé la procureure Aurélie La Rosa à l’occasion du procès. L’un d’entre eux "suivait une formation pour devenir aide-soignant mais a préféré gagner 1 200 € en servant de chauffeur-livreur pour le réseau", rapporte la Voix du Nord.
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Ce Soudanais acheminait le matériel servant à la traversée depuis une base arrière située dans la ville de Douai, jusqu’à la côte, où les trafiquants avaient renoncé à stocker les canots, les gilets de sauvetage et les moteurs de bateaux, en raison de la surveillance renforcée de la police.
Le plus jeune de ces "chauffeurs-livreurs" avait à peine 18 ans. Il était, quant à lui, inscrit au lycée et touchait une indemnité.
"Des gilets de sauvetage pas fiables et des bateaux de mauvaise qualité"
Lors de l’arrestation des passeurs, la police a découvert quatre bateaux, quatre moteurs et 133 gilets de sauvetage dans l’un des boxes de la base arrière du réseau. "Des gilets de sauvetage pas fiables et des bateaux de mauvaise qualité", précise la Voix du Nord.
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L'enquête, ouverte fin juillet, est partie d'un "renseignement britannique" permettant d'identifier "l'acheminement de matériel nautique depuis la Turquie" vers le lieu de stockage à Douai, avait expliqué en octobre Jean Arvieu, adjoint au chef de l'Ocriest, l'office central spécialisé dans la lutte contre l'immigration irrégulière.
Grâce à trois mois de surveillance, les policiers ont appris qu’une livraison de 50 bateaux et de moteurs en provenance de Turquie était attendue par le réseau au moment de l'arrestation des passeurs.
Les arrestations liées aux traversées de la Manche sont régulières dans le Nord. Mais malgré les multiples démantèlements de filières, et toujours plus de moyens policiers déployés sur la côte, les traversées vers le Royaume-Uni ont atteint un record l'an dernier avec 45 756 migrants qui ont rejoint les côtes britanniques.