Alors que les pays européens s'efforcent de se mettre d'accord sur ce qu'il faut faire des migrants qui traversent leurs frontières, beaucoup continuent de transférer les personnes ayant besoin d'une protection internationale des zones dangereuses directement vers l’UE où ils sont en sécurité. En offrant des voies légales, ils réduisent les incitations à la migration irrégulière. Mais les besoins en terme de réinstallation dépassent encore largement le nombre de places disponibles dans le monde entier.
Si les dirigeants européens ont des avis divergents sur la politique migratoire, ils sont d'accord sur un point : la migration clandestine vers l'Europe via la Méditerranée doit cesser.
C’est dans ce but que les États membres de l'UE et les Nations unies se sont engagés à renforcer les programmes visant à identifier les personnes particulièrement vulnérables, et à les faire venir en Europe par des moyens sûrs, contrôlés et légaux.
L'agence des Nations Unies pour les réfugiés, le HCR, a proposé un objectif ambitieux - réinstaller 50 000 personnes en Europe d'ici fin octobre 2019. En mai de cette année, les promesses des pays de l'UE avaient déjà dépassé ce nombre, l'Allemagne et la France en tête de liste avec plus de 10 000 places chacune. Dans le cadre de ce programme, la Suède s'est engagée à réinstaller 8750 personnes et le Royaume-Uni 7 800 personnes .
La direction générale des migrations et des affaires intérieures de l'UE a déclaré à InfoMigrants qu'à la mi-juin, 4 252 personnes avaient été réinstallées en Europe dans le cadre du programme jusqu'à présent.
Qu’est-ce que la réinstallation?
La " réinstallation" est un programme d'accueil humanitaire pour les personnes qui ont fui leur pays d'origine et qui se trouvent dans ce qu'on appelle les pays de premier accueil. Par exemple, les Syriens qui ont fui au Liban ou en Turquie.
Les réfugiés qui ne bénéficient pas d'une protection adéquate dans ces pays de premier accueil, ou qui ne seraient pas en mesure de s'y installer de façon permanente, sont considérés comme admissibles à la réinstallation dans un pays européen.
Les principes de réinstallation du HCR
La réinstallation se fait selon trois principes de base:
1. Accueillir des réfugiés ayant un besoin particulier de protection
2. Les réfugiés qui
se trouvent dans un pays tiers depuis un certain temps mais qui n'ont aucune
perspective d'intégration dans ce pays et qui ne peuvent pas retourner dans
leur pays d'origine devraient également être admis à la réinstallation.
3. La réinstallation devrait se faire principalement à partir de pays qui sont touchés par des mouvements importants de réfugiés.
En 2016, 37 pays ont participé au programme de réinstallation du HCR. Ces dernières années, les États-Unis ont été le premier pays de réinstallation au monde, le Canada, l'Australie et les pays nordiques fournissent également un grand nombre de places.
La réinstallation en Allemagne
En février de cette année, l'Allemagne a rempli son quota de réfugiés
réinstallés pour l'année 2016-2017. Au cours de cette période, 1 600 personnes
ont été mises en sécurité en Allemagne. Le pays s'est prononcé en faveur d’une
augmentation significative pour l'année 2018-2019, en acceptant d'accueillir 10
200 personnes vulnérables dans le cadre de ce programme.
Qui est considéré comme “vulnérable”?
Les programmes de réinstallation visent à protéger les personnes appartenant à l’une ou plusieurs des catégories suivantes :
· Besoin de protection juridique et/ou physique
· Survivants de la torture et/ou de violences, en particulier lorsque le rapatriement ou les conditions d'asile pourraient entraîner un traumatisme supplémentaire, ou lorsqu'il n'existe pas de traitement approprié.
· Besoins médicaux
· Les femmes et les filles à risque qui le sont en raison de leur sexe
· La réunification familiale, lorsque la réinstallation est le seul moyen de réunir les membres de la famille qui ont été séparés
La plupart des États comptent sur le HCR pour qu’il leur recommande la réinstallation d'individus et de groupes de réfugiés. Chaque État évalue ensuite la demande du HCR et décide d'accorder ou non la réinstallation conformément à ses propres politiques et ses lois.
En Allemagne, il y a proportionnellement plus de femmes, d'enfants et de personnes âgées parmi les personnes réinstallées que parmi les demandeurs d'asile en général.
Dans le cadre des programmes de réinstallation, les membres d’une même famille sont acceptés tous ensemble dans la mesure du possible. En 2014, 88 % du nombre total de personnes admises en Allemagne dans le cadre du programme de réinstallation sont venues avec des membres de leur famille.
Alléger la charge pesant sur les pays de premier accueil
Les migrants admis dans le cadre des programmes de réinstallation proviennent de plusieurs États de diverses régions du monde.
En 2017, les réfugiés de Syrie et de la République démocratique du Congo représentaient les deux tiers des personnes identifiées par le HCR pour être réinstallés.
Certains pays de premier accueil sont eux-mêmes touchés par les conflits, comme la Syrie et le Soudan. Il s'agit également de pays proches des régions en conflit, comme la Turquie, le Liban, l'Égypte, la Tunisie et l'Indonésie.
Appel en faveur de la réinstallation
Le HCR a lancé un avertissement : il y a un écart croissant entre le nombre de personnes ayant besoin d'être réinstallées et le nombre de places mises à disposition par les gouvernements.
"Dans le monde entier, seul 1% environ des réfugiés pourra profiter du programme de réinstallation : le besoin est donc beaucoup plus grand que le nombre réel que nous voyons ", a déclaré Dominik Bartsch, le représentant du HCR en Allemagne.
Selon les estimations de l’ONU, 1,4 million de personnes auront besoin d'être réinstallées en 2019. Au rythme actuel, il faudrait 18 ans pour réinstaller les réfugiés les plus vulnérables dans le monde entier.
Alors que l'Union européenne aide les États membres à financer la réinstallation - 500 millions d'euros du budget de l'UE iront au "programme 50 000" du HCR, chaque pays est responsable du financement de son propre programme. Cela signifie que chaque nation doit payer pour les entretiens et le processus de sélection, les contrôles médicaux et l'orientation avant le départ, les visas de sortie du pays d'asile, les voyages et les services à l'arrivée dans le nouveau pays de réinstallation.
Si les pays membres de l'UE veulent pouvoir respecter leurs engagements en matière de réinstallation, ils devront convaincre leurs électeurs que cela en vaut la peine.
Vous trouverez des informations utiles dans le Manuel de réinstallation du HCR.