La police soudanaise accompagnée d’Interpol a secouru 94 personnes -dont 85 enfants- dans la région de Khartoum où elles avaient été mises au travail forcé. Il s’agissait, pour la plupart, de migrants africains originaires de plusieurs pays en route vers l’Europe.
Quatre-vingt-cinq enfants et neuf adultes réduits en esclavage ont été secourus lors d’une vaste opération de police menée fin août dans la capitale du Soudan, Khartoum, et ses alentours. “Nous pensons que les victimes, dont la plupart étaient originaires d’autres pays d’Afrique, étaient de passage par le Soudan pour tenter de rejoindre l’Europe et qu’elles ont été kidnappées en route”, indique Tim Morris, directeur exécutif chez Interpol qui a mené l’opération conjointement avec la police soudanaise.
Les victimes sont originaires du Tchad, de la République démocratique du Congo, de l'Érythrée, du Niger, du Soudan et du Soudan du Sud, précise Interpol. Parmi elles des dizaines d’enfants, certains à peine âgés de 10 ans, travaillaient notamment dans des mines d’or illégales à l’est de Khartoum et manipulaient des produits chimiques dangereux comme du mercure ou du cyanure. D’autres étaient forcés de faire la manche dans les rues de la capitale.
Contacté par InfoMigrants, le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) à Khartoum affirme être en contact avec le gouvernement soudanais pour obtenir une protection internationale aux rescapés mineurs. En attendant, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) leur fournit de la nourriture et des soins. Ils seront, dans un second temps, interrogés sur les circonstances de leur enlèvement et leurs conditions de vie.
"Ces enfants ont été placés dans des centres d’accueil pour mineurs où il ont accès à l’éducation", précise à InfoMigrants Didier Clergeot, officier en renseignements criminels chez Interpol. "Ils ne sont reconduits dans leur pays d’origine en rapatriement humanitaire que si leur identité est confirmée et leurs parents identifiés".
465 000 esclaves modernes au SoudanLes quelque 200 policiers déployés pour l’opération baptisée Sawiyan (“ensemble” en langue locale) sont également parvenus à arrêter 14 suspects dont 12 femmes, ainsi qu’à saisir 20 000 dollars (17 325 euros). Une partie de cette somme pourrait correspondre "au versement d'une rançon" après l'enlèvement d'un migrant, qui faisait partie lui-même des victimes du réseau démantelé, précise Interpol.
"Il faut savoir que les routes migratoires du Soudan ne sont pas plus ou moins dangereuses que celles de la Libye dont on a beaucoup parlé", poursuit Didier Clergeot d’Interpol, expliquant que le risque de tomber aux mains de trafiquants est aussi élevé qu’en Libye. "Il n’y a pas d’échelle de valeur ou de comparaison à faire entre les pays, le danger est présent à chaque étape de la migration. La seule différence c’est que le Soudan est un pays de transit, leur but étant d’atteindre la Libye ou l’Égypte", rappelle-t-il.
Avec 465 000 personnes victimes d’esclavage moderne sur son sol, le Soudan se classe parmi les pires pays au monde, selon les données 2018 du Global Slavery Index. L’opération Sawiyan fait partie, selon Tim Morris, d’une série de raids se déroulant sur les routes migratoires afin de contrer le trafic d’êtres humains en Afrique du Nord et au Sahel.