Des membres des forces gouvernementales libyennes prennent position lors d’affrontements à Ain Zara au sud de Tripoli, le 21 avril 2019. Crédit : Reuters / Ahmed Jadallah
Des membres des forces gouvernementales libyennes prennent position lors d’affrontements à Ain Zara au sud de Tripoli, le 21 avril 2019. Crédit : Reuters / Ahmed Jadallah

Une attaque aux circonstances encore floues a ciblé le centre de détention pour migrants de Qaser Ben Ghashir, au sud de Tripoli, mardi soir. Des témoins rapportent qu'il y a eu entre deux et six morts mais l’ONU ne confirme qu’une douzaine de blessés.

“Nous avons désespérément besoin d’assistance médicale, environ 10 personnes sont en train de perdre du sang”. Ce message est le dernier qu’InfoMigrants a reçu, mardi 23 avril à 21h, de la part d’un détenu du centre de Qaser Ben Ghashir dans le sud de Tripoli, en Libye. L’homme raconte avoir vu pénétrer dans le bâtiment un groupe armé qui a ouvert le feu sur les migrants. “Je me suis enfui et me suis caché jusqu’à la fin”, a-t-il expliqué.

Selon l’ONU, plusieurs migrants ont été blessés mardi lors de cette attaque aux circonstances encore floues. Le HCR, qui n’a actuellement pas accès au centre de Qaser Ben Ghashir, fait état d’au moins 12 blessés, mais d'aucun décès pour l’heure.

“La situation était tendue entre les migrants à l’intérieur du centre. La violence a été utilisée pour calmer la situation, mais aucune blessure par balle n’a encore été constatée”, indique ainsi Paula Barrachina, porte-parole du HCR en Libye, jointe par InfoMigrants. L’agence onusienne ne confirme pas non plus l’identité du groupe armé, auteur desdites violences.

“Les blessés ont été transportés à l'hôpital où ils se trouvent toujours pour le moment. Le HCR n’a pas procédé au transfert, mais l’a coordonné avec ses partenaires et a suivi les opérations de très près”, ajoute Paula Barrachina.

Moins nuancé, le bureau libyen de l'OIM, l’autre agence onusienne, parle, pour sa part, de “migrants sans défense [qui] auraient été la cible de tirs aveugles". "Plusieurs d'entre eux ont été sérieusement blessés".

Au moins six morts, selon un porte-parole du gouvernement libyen

Une version des faits que partagent d’autres témoins, joints par InfoMigrants. “Il y a sûrement des morts", affirme un migrant détenu au centre d’Abou Selim en contact direct avec l’un de ses proches à Qaser Ben Ghashir. "Juste avant l’attaque ils ont procédé à des fouilles, à la recherche de téléphones portables. Puis ensuite ils ont tiré. Il y a désormais des tanks qui entourent le centre”. Selon lui, le groupe armé appartient aux rangs du maréchal Khalifa Haftar.

Un autre migrant, enfermé pour sa part à Tariq Al Sikka, à Tripoli, et lui aussi en contact avec un proche à Qaser Ben Ghashir, parle lui aussi de morts. “On m’a confirmé qu’il y avait au moins deux morts, un Somalien et un Érythréen”, indique-t-il à InfoMigrants. " Certains blessés se trouvent encore à l’intérieur du centre". 

La journaliste irlandaise Sally Hayden qui a réussi à rétablir le contact avec une personne au sein de Qaser Ben Ghashir a partagé sur Twitter un témoignage selon lequel des ambulances sont venues sur place emportant deux corps sans vie et plusieurs blessés.

Des associations comme Migrace et AlarmPhone font aussi état de plusieurs victimes.

De son côté, l’agence de presse turque Anadolu Agency annonce un bilan d’au moins six morts après s’être entretenue avec Mustafa el-Mecei, porte-parole du gouvernement d’union national (GNA) reconnu par la communauté international. Ce dernier accuse les forces du maréchal Haftar d’être les responsables de cette attaque.

Situé à une trentaine de kilomètres de Tripoli, le centre de détention de Qaser Ben Ghashir se trouve dans une zone contrôlée par les forces du maréchal Haftar qui mènent depuis le 4 avril une offensive pour prendre le contrôle de la capitale libyenne, siège du GNA. Ce dernier, peut-on lire dans la presse locale, a demandé au Conseil de sécurité des Nations unies d’envoyer un comité d’enquête pour faire la lumière sur les événements.

>> À (re)lire sur InfoMigrants : Affrontements en Libye : “Nous attendons désespérément que l’ONU vienne nous libérer”

Au 12 avril, le HCR avait indiqué que 728 migrants étaient détenus dans le centre Qaser Ben Ghashir. L'organisme international avait souhaité les transférer au centre de Zintan, à l’écart des affrontements, mais il s'était heurté au refus des migrants demandant à être évacués hors de Libye.

Toujours selon l’ONU, environ 3 600 migrants se trouvent dans des centres de détention dans des zones proches des lignes de front.

 

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