Le ministre allemand de l’Intérieur, Horst Seehofer, a laissé entendre que des réfugiés syriens rentraient dans leur pays pour y passer des vacances, une infraction à leur statut de protection internationale. Le ministre milite pour le retrait de leur statut de réfugié. InfoMigrants fait le point sur cette polémique.
Le ministre allemand de l’Intérieur a estimé que les réfugiés syriens qui rentrent dans leur pays pour des visites privées devaient être expulsés d'Allemagne. "Les réfugiés syriens qui vont régulièrement passer des vacances en Syrie ne peuvent pas sérieusement prétendre d’avoir été persécutés. Nous devons retirer à ces personnes leur statut de réfugié", a affirmé Horst Seehofer dans une interview au tabloïd allemand Bild am Sonntag publiée le 18 août.
Le ministre a aussitôt essuyé les critiques de la Diakonie, l’oeuvre sociale de l’Église protestante allemande. Selon ce collectif, les Syriens qui rentrent chez eux pour des visites sont des cas très rares. La Diakonie ajoute que ces personnes sont uniquement retournées en Syrie pour des urgences, comme pour se rendre au chevet d’un parent mourant ou pour tenter d’empêcher une saisie de propriété par le régime de Bachar Al-Assad.
La règle générale
En Allemagne, comme dans de nombreux pays européens, un réfugié n’a pas l’autorisation de retourner dans son pays, puisque le statut de protection implique qu’un retour présente un danger pour lui. Le fait de rentrer laisse supposer que la situation dans le pays s’est améliorée et que le statut de réfugié n’est donc plus nécessaire. Aussi, les autorités pourraient en déduire que les bases sur lesquelles elles ont décidé du statut de protection donné à une personne n’était pas bien-fondées dès le départ.
Néanmoins, comment réagissent les autorités lorsque des circonstances particulières, comme une urgence familiale, rendent un retour au pays nécessaire pour un réfugié ? Va-t-on le suivre à la trace pendant son voyage ? Peut-on effectivement lui retirer son statut de protection ?
Nous avons posé nos questions au BAMF, l’Office fédéral allemand des migrations et des réfugiés.
Existe-t-il des exceptions qui autorisent un réfugié à rentrer dans son pays ?
Il existe des situations que le BAMF considère comme exceptionnelles, comme assister à un enterrement ou rendre visite à des membres de la famille gravement malades. Si une personne retourne pour ces raisons dans son pays, cela ne va pas mener automatiquement à une révocation de son statut de réfugié. Le BAMF précise que chaque cas doit être examiné individuellement.
Comment ces visites sont-elles détectées par les autorités ?
Le BAMF "reçoit des indications de la police ou des autorités étrangères". Si le BAMF ne suit pas les mouvements des personnes, ce sont généralement les autorités du pays d’origine ou encore les services sociaux qui sont obligés de notifier l’Office du retour d’un réfugié dans son pays.
Cette information est ensuite utilisée par le BAMF pour vérifier si une réévaluation du statut de protection s’avère nécessaire.
Il y a environ 770 000 réfugiés syriens en Allemagne. Savez-vous combien d’entre eux se rendent en visite en Syrie et combien de personnes ont perdu leur statut de protection à cause de l'un de ces voyages ?
Le BAMF affirme ne pas pas avoir de chiffres ou d’estimations.
Actuellement, le statut de réfugié d’une personne est réexaminé par le BAMF tous les trois ans. En 2018, ces réévaluations ont concerné près de 53 000 Syriens. À la fin, le statut de réfugié a été retiré à seulement 248 personnes.
Que fait le BAMF lorsqu’il est informé d’un voyage en Syrie ?
Si le BAMF est informé d’un voyage en Syrie, il peut lancer une procédure de réexamen spécial. L’Office explique que "si le voyage est justifié par des vacances ou s’il s’agit d’un séjour prolongé dans le pays d’origine, cela peut indiquer que le réfugié ne craint plus d’être persécuté." Dans ce cas, le statut de protection peut être révoqué, selon le droit d’asile allemand.
Peut-on expulser les Syriens ?
Même si le statut de réfugié est retiré, une personne ne peut actuellement pas être expulsée vers la Syrie car la loi allemande l’interdit. Cela étant, cette interdiction arrive à son terme à la fin de cette année. On ne sait pas encore si, et pour quelle durée, cette disposition va être prolongée.
Traduction : Marco Wolter