Alors que la menace du coronavirus plane, les activités des ONG impliquant plusieurs migrants ont été temporairement suspendues dans le camp surpeuplé de Moria, en Grèce. InfoMigrants fait un état des lieux des services toujours accessibles sur place vendredi.
Après l’apparition d’un premier cas de contamination par le coronavirus sur l‘île de Lesbos, en Grèce, les autorités du camp de Moria ont recommandé aux travailleurs humanitaires et aux ONG présents à l’intérieur du site de suspendre les activités impliquant plusieurs migrants, a-t-on appris auprès de plusieurs acteurs sur place.
Le but de ces mesures est de prévenir une éventuelle propagation du virus dans le camp surpeuplé où s’entassent plus de 19 000 personnes dans une proximité extrême. "Les réunions et les activités qui rassemblent beaucoup de monde dans les containers [bâtiments en préfabriqués installés à l’intérieur du camp, NDLR] sont suspendues", affirme Astrid Castelein, cheffe du bureau du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) à Lesbos, contactée par InfoMigrants. Pour exemple, des "focus groups", réunions d’information hebdomadaires organisées dans ces "containers" notamment à destination des femmes et des jeunes filles, des cours de yoga et des cours d’informatique dispensés à certains mineurs ont été arrêtés.
Plus important : le service en charge de l’asile en Grèce (Greek Asylum service) a annoncé cesser temporairement ses activités à l’intérieur et à l’extérieur du camp jusqu'au 10 avril. Ce service permettait jusqu’à présent aux migrants de mener des démarches administratives telles que le renouvellement de leur carte d’asile.
Compte tenu de cette situation, les autorités ont annoncé
que les dates d’expiration des cartes de séjour seront repoussées jusqu’à ce
que le Greek Asylum service reprenne ses activités, fait par ailleurs savoir le
HCR.
Alors que plusieurs pays à travers la planète prennent des mesures drastiques contre la pandémie de coronavirus, la Grèce a de son côté fermé toutes les écoles, crèches et universités du pays, ainsi que les cinémas, théâtres, tribunaux, musées et discothèques après le premier mort de la maladie, un Grec de 66 ans. Sur l’île de Lesbos, une habitante de 40 ans, a pour la première fois été diagnostiquée positive au virus, a indiqué lundi l’hôpital de Mytilène où elle a été admise.
Les entretiens avec le HCR maintenus avec des mesures d’hygiène
Présent à Moria et actif dans six "containers", le
HCR assure prendre la mesure de la situation et avoir fait le tri dans les
activités. "Nous sommes toujours présents sur place", rassure Astrid
Castelein. "Nous continuons à recevoir des demandeurs d’asile dans le
cadre de demandes de transfert, d’assistance monétaire ainsi que dans le cadre de
demandes de protection, comme quand, par exemple, un demandeur d’asile veut
avoir accès à un avocat."
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Ces entretiens entre des membres du HCR et des migrants sont ainsi maintenus avec cependant un renforcement des mesures de précaution. "Nous mettons en place des mesures d’hygiène et nous demandons aux personnes de respecter une distance sociale de un mètre", explique Astrid Castelein, qui avoue que l’application de telles mesures est compliquée.
Certaines activités ont par ailleurs été mises en suspens. "Nous avons mis un terme temporairement aux cours d’éducation non formelle dispensés jusque-là de manière journalière à 170 enfants non-accompagnés", poursuit Astrid Castelein. Ces cours, sortes de substitut à l’école nationale grecque destiné à des jeunes de 15-16 ans, avaient lieu à Mytilène, principale ville de l’île de Lesbos. Ils étaient censés permettre aux jeunes d’apprendre des matières comme le grec, les mathématiques, l’histoire.
Les équipes de MSF toujours en activité
Dans ce contexte, l’ONG Médecins sans frontière (MSF), qui n'est pas physiquement présente à l'intérieur du camp mais devant, se veut quant à elle rassurante. Vendredi, elle assurait "poursuivre normalement" ses activités sur l’île et même fonctionner "à plein régime". La population du camp de Moria peut donc toujours être prise en charge médicalement en cas de besoin.
L'ONG dispose de deux cliniques sur Lesbos. L’une, située en face du camp, est une clinique pédiatrique, où environ 70 enfants viennent pour des consultations tous les jours, selon l’ONG. L’autre est située dans la ville de Mytilène. Il s’agit d’un établissement où psychiatres, psychologues et médecins généralistes accueillent les victimes de violences sexuelles et de toutes formes de violence.
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"Nous nous tenons informés de la situation et nous prendrons des mesures supplémentaires si nécessaire mais pour l’heure nous sommes déterminés à rester ouverts pour nos patients", a déclaré Stephan Oberreit, membre de MSF.
Selon MSF, le camp de Moria est "l’endroit parfait pour que le coronavirus se propage". "Dans certains endroits du camp, il n’y a qu’un seul robinet d’eau pour 1 300 personnes et pas de savon", a alerté le Dr Hilde Vochten, coordinateur médical de l’ONG en Grèce. "Des familles de cinq ou six personnes dorment dans des espaces n’excédant pas 3 mètres carrés. Cela veut dire que les mesures recommandées, telles que se laver les mains fréquemment et observer des distances avec les gens pour empêcher le virus de se propager, sont tout simplement impossibles."