Le massacre cette semaine de trente personnes dont vingt-six migrants du Bangladesh, à Mizdah, à 160 km de Tripoli, capitale libyenne, a attiré l’attention sur les filières de migrants originaires du Bangladesh qui gagnent la Libye dans le but d’atteindre les côtes européennes.
Le ministère des Affaires étrangères du Bangladesh a dénoncé vendredi 29 mai le fait que ces migrants massacrés avaient été enlevés, détenus et torturés en Libye par des passeurs, en vue de leur soutirer des rançons. Ils étaient passés par l’Egypte et ont été enlevés, non loin de Benghazi, dans l’est libyen.
Le Bangladesh, petit pays très peuplé de l’Asie du Sud-Est, est désormais l’un des principaux pays d’origine des migrants qui cherchent à gagner l’Europe via la Méditerranée, selon l’Organisation internationale pour les migrations. L’OIM évoque des raisons économiques dues notamment à la sécheresse qui déplace annuellement 700 000 personnes à l’intérieur du Bangladesh. Beaucoup préfèrent alors le « paradis européen » aux bidonvilles de Dacca, capitale du Bangladesh.
Les migrants prennent l'avion avant d'atteindre la Libye
Des sociétés fictives pour l’emploi de main d’œuvre étrangère sont montées par des réseaux de passeurs à Dacca et surtout à Tripoli, capitale libyenne. Ces réseaux offrent des contrats de travail fictifs en Libye et promettent aux candidats de leur faciliter le voyage. En effet, ces migrants prennent l’avion pour atteindre la Libye, un moyen plus facile et moins dangereux que la traversée du désert que pratiquent les migrants originaires d’Afrique subsaharienne.
Ces migrants passent soit par la ligne Dacca-Dubaï-Istanbul pour gagner Tripoli, soit par l’Egypte d’où ils traversent les frontières terrestres vers la Libye. Selon le ministère des Affaires étrangères du Bangladesh, c’était le cas des migrants tués cette semaine.
Selon l’AFP, chaque migrant paye à ces réseaux bien rodés de trafiquants entre 7 000 et 15 000 euros, soit vingt ans de salaire moyen au Bangladesh.
Enlevés et torturés si les familles ne payent pas de rançon
Une fois sur place, le scénario est le même qu’avec les migrants africains, à savoir qu’ils sont enlevés par les mêmes personnes qui ont organisé et facilité leur voyage. Une rançon est alors réclamée à leurs familles. S’ils ne payent pas, ils seront torturés et devront effectuer, pendant des mois, toutes sortes de travaux forcés.
Ces informations recueillies grâce aux témoignages de migrants qui ont atteint l’Europe sont complétées par des déclarations de sources sécuritaires au Caire et à Tripoli. Un responsable libyen, sous couvert d’anonymat, a confié au quotidien Qatari al Arbi al Jadid, que l’augmentation soudaine du nombre de bureaux d’emploi de main d’œuvre étrangère à Tripoli a attiré l’attention des autorités.
L’interrogatoire de ces migrants a mis à nu les activités illégales de ces bureaux qui présentaient, à chaque fois, de vrais documents et contestaient être au courant de projets d’immigration de leurs clients. Toujours selon ce responsable, 25 % de migrants gagnent la Libye moyennant ces bureaux.
Ces crimes ont également été dénoncés par l’Egypte qui a arrêté des médiateurs de ces bureaux d’emplois fictifs, en activité au Caire.
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Texte initialement publié sur : RFI