Dimanche, 56 passeurs égyptiens ont été condamnés à des peines de prison ferme pour leur rôle dans la mort de 202 migrants morts noyés au large des côtes égyptiennes, en septembre dernier. Un drame qui en dit long sur le trafic de migrants en Égypte, pays devenu en quelques mois une nouvelle porte d’entrée vers l’Europe.
Le 21 septembre 2016, après le naufrage d’une embarcation de fortune, 202 migrants ont péri dans la mer Méditerranée. Ils étaient 450 à bord. Tous avaient embarqué depuis les côtes égyptiennes. Dimanche 26 mars, Le Caire a rendu justice aux victimes : 56 Égyptiens, tous passeurs ou intermédiaires, ont été jugés pour leur responsabilité dans la mort de ces personnes et condamnés à des peines allant de 7 à 10 ans de prison. Seules 31 personnes étaient présentes lors du procès, 25 autres étant jugées par contumace.
Selon RFI, 10 à 15% des embarcations de migrants qui arrivent en Italie partent aujourd’hui des côtes égyptiennes. De plus en plus de migrants choisissent donc le pays comme nouvelle porte d’entrée vers l’Europe. Pourquoi ? Pour éviter la Libye, un pays chaotique à la merci des milices, pour éviter la Turquie qui a passé un accord avec l’UE sur le refoulement des migrants en Grèce, et pour éviter la route des Balkans complètement verrouillée. La situation est telle que Frontex, l’agence chargée de la gestion des frontières extérieures de l’UE, s’est inquiété en juin 2016, que le pays ne devienne un nouveau "pays de départ" des migrants.
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— GrandReportageRFI (@ReportageRFI) 10 novembre 2016
Le trafic est d’ailleurs devenu particulièrement rentable en Egypte. "Mes prix ont augmenté […]", a précisé un passeur interrogé par RFI, qui se félicite de son business. "On ne met pas toujours autant de migrants sur un même bateau", réagit-il après le drame du 21 septembre. "Mais on le fait en fin de saison quand on sait que la météo ne permettra plus les traversées. Là, on en met autant qu’on peut. Si le bateau coule, il coule. Ça n’a pas d’impact sur notre business. Les gens continueront toujours à vouloir partir."
Les Africains subsahariens ne sont pas les seuls à attendre une embarcation sur le rivage égyptien. De nombreux ressortissants du pays prennent aussi le large vers les côtes européennes. "Ici, la situation économique est dure, cela force les gens à partir", ajoute le passeur. La plupart des rescapés du 21 septembre 2016 étaient en effet des Égyptiens, bien qu’il y ait aussi des Soudanais, des Érythréens, des Syriens et un Éthiopien, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
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Pour contre les flux migratoires et lutter contre la mafia, Le Caire a durci sa législation. Le Parlement égyptien a adopté cet hiver une loi contre les réseaux de passeurs qui prévoit même des peines de prison contre les personnes qui hébergent des migrants, les transportent ou facilitent d'une manière ou d'une autre leur voyage.
La pire catastrophe en Méditerranée depuis des décennies a eu lieu en avril 2015 au large des côtes libyennes quand jusqu'à 800 migrants venant d'Afrique de l'ouest avaient péri dans le naufrage d'un chalutier qui avait percuté un cargo portugais venu lui porter secours.