Gérald Darmanin, le nouveau ministre français de l'Intérieur, arrive à l'Élysée, mardi 7 juillet. Crédit : Reuters
Gérald Darmanin, le nouveau ministre français de l'Intérieur, arrive à l'Élysée, mardi 7 juillet. Crédit : Reuters

Gérald Darmanin, ministre de l'Action et des Comptes publics et maire de Tourcoing, dans le département du Nord, succède au socialiste Christophe Castaner comme ministre de l'Intérieur. Ses proches soulignent "sa bonne connaissance du terrain" quant aux questions migratoires qu'il entendait traiter, il y a deux ans déjà, avec "fermeté" et "bienveillance".

C'est un virage encore un peu plus à droite qu'a amorcé le nouveau gouvernement du Premier ministre français, Jean Castex, avec la nomination de Gérald Darmanin au ministère de l'Intérieur. "Grand honneur, pour le petit-fils d'immigré que je suis, d'être nommé ministre de l'Intérieur de notre beau pays" a réagi sur Twitter ce petit-fils de tirailleur algérien et résistant, né en 1982 à Valenciennes, dans le Nord, d'un père tenancier de bar et d'une mère femme de ménage. Il succède au socialiste Christophe Castaner, en poste depuis une vingtaine de mois seulement.

Militant et encarté depuis l'âge de 16 ans, le nouveau locataire de la place Beauvau a flirté avec la frange la plus à droite de l'échiquier politique au début de sa carrière avant de se rapprocher de l'ancien président Nicolas Sarkozy à partir de 2014 et de la direction des Républicains.

Secrétaire général adjoint du parti, Gérald Darmanin démissionne en mars 2017 sur fond d'un scandale politique concernant le candidat républicain à la présidentielle, François Fillon. Deux mois plus tard, il est nommé ministre de l'Action et des Comptes publics et fait ainsi son entrée au gouvernement du nouveau président Emmanuel Macron qu'il qualifiait pourtant quelques mois auparavant de "poison définitif" de la Ve République et de "pur produit du système".

Actif également au niveau local, il accepte en 2017 de quitter son poste de maire de Tourcoing, dans le Nord, en vertu d'une règle tacite de non-cumul des mandats édictée par l'Élysée. Il demeure toutefois premier adjoint au maire de la ville et conserve également une place de choix au sein de la vice-présidence de la Métropole européenne de Lille et en tant que conseiller régional des Hauts-de-France.

Malgré ses fonctions de ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin se présente comme tête de liste aux élections municipales de 2020 pour redevenir maire de Tourcoing. Il l'emporte dès le premier tour avec plus de 60% des suffrages tandis que la majorité présidentielle enregistre des scores moroses partout ailleurs. Menaçant l'exécutif de quitter le gouvernement, il est autorisé, en pleine période inédite de pandémie de coronavirus, par Emmanuel Macron et Édouard Philippe, à cumuler son poste de ministre et de maire "pour un temps", en attendant que la situation soit "clarifiée". Il a, en revanche, démissionné du conseil régional des Hauts-de-France.

Une chance de mieux gérer les questions migratoires, dit la maire de Calais

Le présentant comme "un ami", Natacha Bouchart, maire de Calais, dans le département voisin du Pas-de-Calais, voit dans la nomination du nouveau ministre de l'Intérieur une chance de mieux gérer les questions migratoires. "Gérald Darmanin a connu la crise de 2016, il en a vécu aussi tous les déboires puisque nous étions à la région ensemble au moment des événements [dont le démantèlement de la "jungle" de Calais en octobre cette année-là, NDLR]", a-t-elle déclaré mardi sur BFM TV.

Se réjouissant particulièrement de l'arrivée d'un ministre qui connaît, selon elle, la réalité du terrain dans le nord de la France, l'édile n'a pas hésité à lui faire un appel du pied alors que le nombre de migrants sans-abri à Calais augmente ces dernières semaines. "Gérald Darmanin a désormais le pouvoir de mettre des moyens supplémentaires sur le territoire. [...] Il est important qu'il puisse prendre en compte les demandes que je fais depuis décembre dernier pour maintenir ou augmenter les trois compagnies et demi de CRS que nous avons", a-t-elle fait savoir, l'appelant également à se rapprocher de son homologue au ministère de la Justice, pour "voir quels sont les dispositifs qui pourraient être améliorés afin que les tensions diminuent sur le territoire de Calais".

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Lors de son discours de prise de fonction, mardi 7 juillet, Gérald Darmanin n'a pas évoqué la question migratoire, préférant mettre l'accent sur "son soutien total" aux membres des forces de l'ordre. "Qu'ils ne doutent jamais que je serai toujours le premier d'entre eux", a-t-il déclaré, souhaitant faire de son ministère "un refuge" et "un exemple". Il "est le premier des ministères sociaux car quand il n'y a pas d'ordre républicain, ce sont les plus faibles d'entre nous qui trinquent".

Le nouveau ministre de l'Intérieur n'a, cependant, jamais dissimulé sa ligne de fermeté quant aux questions migratoires. En 2018, il avait notamment expliqué, à une chaîne de télévision locale lors d'une visite à Briançon, que la France "ne pouvait pas accueillir toute la misère du monde", appelant l'Europe à prendre plus de responsabilités et la communauté internationale à participer à la stabilisation du Moyen-Orient et de l'Afrique. Il avait d'ailleurs annoncé dans ce cadre un doublement des crédits au développement d'ici la fin du quinquennat. Le but étant de "dire aux Africains que le développement de leur continent c'est leur avenir". Plaidant pour une politique migratoire à la fois "bienveillante" et "ferme", il avait aussi estimé que les reconduites à la frontière devaient être plus fréquentes pour les sans-papiers ainsi que les démantèlements de réseaux de passeurs.

Gérald Darmanin fait, par ailleurs, l'objet d'une plainte pour viol, harcèlement sexuel et abus de confiance. Entendu en audition libre en 2018, il a indiqué avoir eu une relation sexuelle consentie et à l'initiative de la plaignante. Après deux ans de bataille procédurale, la cour d'appel de Paris a ordonné début juin la reprise des investigations. Cette affaire semble évoluer "dans le bon sens" et cette plainte "n'a pas fait obstacle" à la promotion d'un ministre qui "aspirait à plus", a commenté lundi l'entourage d'Emmanuel Macron, saluant l'arrivée d'un homme qui, dit-on, "incarne l'ordre républicain, une priorité du gouvernement".

 

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