Samedi matin, trois migrants nigérians sont morts dans l'incendie de leur bâtiment de la cité HLM "Les Flamants", à Marseille, dans le sud de la France. Pris de panique, ils se sont défenestrés. Un enfant est toujours hospitalisé, entre la vie et la mort.
Malgré l’intervention rapide des pompiers, le bilan est dramatique. Samedi matin peu après 5h, un incendie déclenché dans un immeuble de la cité HLM "Les Flamants" a fait trois morts, des hommes de 20 à 30 ans de nationalité nigériane. Deux autres sont hospitalisés en urgence absolue, ainsi qu’un enfant de deux ou trois ans très gravement brûlé. Neuf autres personnes sont plus légèrement blessées, selon le bilan du parquet.
Les victimes, paniquées par les flammes qui se propageaient dans le bâtiment, se sont défenestrées. Des draps noués pendant sur la façade de ce bâtiment d'une dizaine d'étages témoignaient samedi matin de la panique qui a saisi les occupants, affirme l’AFP. L'incendie s'est rapidement propagé par les gaines techniques, mais n'a pas atteint les appartements qui sont "indemnes de pénétration de fumée", a déclaré Dominique Laurens, procureure de Marseille lors d'un point presse.
Tensions entre les migrants et les trafiquants de drogue
"L'existence de deux départs de feu, l'un au sixième étage, l'autre dans la cage d'escalier" a conduit les enquêteurs sur une piste criminelle, a-t-elle ajouté.
À l'origine du drame, d’après la communauté nigériane : les trafiquants de drogue. "Les dealers nous terrifient. Ils ont des armes. Ils nous empêchent de dormir", a fait savoir à l’AFP Azeke Endurance, 30 ans. Selon la préfète de police, Frédérique Camilleri, présente sur les lieux dans la matinée, il y a bien "un point de deal (de drogue) notoire ici et il y a des tensions entre les habitants et les trafiquants".
Dominique Laurens le reconnaît elle aussi, la situation sur place est "extrêmement tendue", expliquant que dans la cage d'escalier du bâtiment, les tarifs des stupéfiants sont inscrits sur les murs.
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Un Nigérian de 31 ans y habitait depuis un an avec sa femme désormais enceinte de six mois. Tous les mois, le couple devait payer un loyer illégal aux trafiquants de drogues qui dealent dans l'immeuble. "Des fois, ils frappaient ma femme parce qu'ils venaient chercher l'argent. Parfois, ils prenaient 200 euros, parfois 300 euros", a raconté ce demandeur d'asile à France Bleu. "Si tu leur dis que tu n'as pas d'argent, ils te tapent à plusieurs." Avec sa femme enceinte, ils vont se résoudre à dormir dans la rue, "moins dangereux que le squat".
"Une situation très préoccupante"
La vétusté du bâtiment, qui devait être détruit, est aussi pointée du doigt. "La situation était très préoccupante", a reconnu Lionel Royer-Perreault, le président d'Habitat 13, propriétaire de la résidence, tout en précisant que l'ensemble ne faisait l'objet d'aucun arrêté de péril. Au moment de l'incendie, il restait au total 14 locataires légaux dans l'immeuble et un seul dans la partie incendiée.
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Après le drame samedi soir, "91 personnes dont 28 femmes et 27 enfants ont été conduites par les services municipaux dans deux gymnases pour une mise à l'abri d'urgence", a précisé la mairie qui a appelé l'État "à proposer un hébergement digne à toutes les personnes sinistrées".
À Marseille, quelque 100 000 personnes seraient victimes de mal-logement, selon un rapport de 2015, souvent dans des quartiers nord, déshérités et touchés par des trafics. Parmi elles, de nombreux migrants, pour qui le squat de ces bâtiments insalubres et dangereux restent la solution d’hébergement.