A l'heure où l'Afghanistan est tombé aux mains des Taliban, les autorités britanniques ont promis d'accueillir 20 000 Afghans, dont 5 000 pourraient fouler le sol britannique au cours de la première année. Mais ces annonces s'inscrivent dans un contexte de durcissement de leur politique d'asile, et de renforcement de leur frontière avec le nord de la France.
Ce mercredi 18 août, le Premier ministre Boris Johnson a fait le point, devant la chambre des communes, sur le plan d'évacuation des ressortissants afghans. Pour l'heure, 2 052 Afghans - et 306 expatriés - ont pu être accueillis sur le sol britannique.
La veille, le gouvernement britannique avait officiellement promis d'accueillir, au total, 20 000 Afghans, en donnant la priorité aux femmes, aux filles et aux minorités. Les autorités ont précisé que 5 000 personnes pourraient venir dès la première année. Ces dernières seront, avant tout, celles qui ont travaillé avec le gouvernement et l'armée britannique.
Les 15 000 exilés Afghans restants seront accueillis "à long terme", indiquent les autorités. Aucune date précise n'a été donnée. "Qui sera éligible ? Comment cela va se passer ? Les précisions manquent", relève Lucie Bichet, chargée de suivi et de plaidoyer pour l'ONG Safe Passage, jointe par InfoMigrants.
"5 000, c'est très peu"
Le Home office, équivalent du ministère français de l'Intérieur, se félicite de présenter "un des plans de relocalisation les plus généreux dans l'histoire de notre pays". Dans un communiqué, le ministère explique avoir dupliqué le "schéma de relocalisation des Syriens vulnérables", ayant eu cours de 2014 à 2021, "qui fut un succès".
Pourtant, les ONG et l'opposition critiquent l'insuffisance de ce plan d'accueil des Afghans. "Ce n’est pas du tout à la hauteur des enjeux actuels", tranche Lucie Bichet : "les chiffres sont limitées sur la première année", alors que les arrivées seront, précisément, nombreuses sur cette période. "5 000, c'est très peu au vu des capacités d'accueil britanniques" résume-t-elle.
Pas de main tendue pour les Afghans bloqués depuis des années à Calais
Ces annonces du gouvernement britannique mettent aussi en lumière l'absence de main tendue aux migrants afghans - et aux autres - bloqués depuis de nombreuses années à Calais et sur le littoral nord de la France. Depuis des années, les Britanniques multiplient les plans de militarisation de leur frontière maritime dans la Manche pour stopper les arrivées de migrants depuis Calais.
"Rien, dans les annonces officielles, ne concerne les Afghans qui se trouvent déjà en France" expose Lucie Bichet.
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La volonté affichée de plusieurs chefs d'États européens de lutter contre les "flux migratoires importants" augure même plutôt d'un durcissement des contrôles frontaliers.
Boris Johnson va échanger "dans les prochains jours avec les leaders du G7" à propos des prochaines arrivées d'exilés afghans sur le sol européen, indique le Home office. Il y a peu d'espoir qu'une politique d'ouverture envers les migrants de Calais voie le jour.
"Il ne faudrait pas non plus oublier que la politique d'asile britannique va vers davantage de fermetures", rappelle Lucie Bichet.
Le projet de loi réformant le système d’asile, actuellement en discussion, est dur : il entraînera "la réduction des voies légales, et la criminalisation croissante des exilés amenés à rejoindre le pays de manière illégale... Y compris des Afghans", expose la juriste.
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Enfin, l'application du Brexit début 2021 a signé la fin du règlement Dublin III, et celle de l'amendement Dubs qui encadraient la venue de mineurs non-accompagnés. Ces deux textes juridiques permettaient de procéder à de nombreux regroupements familiaux. Depuis, les voies légales pour rejoindre le Royaume-Uni se sont fortement restreintes, ce qui pourraient pousser les mineurs à se tourner vers les passeurs et trafiquants pour tenter de rejoindre le sol britannique.