Des familles afghanes déplacées, qui fuient la violence dans leurs provinces, se tiennent près de tentes dans un abri de fortune au parc Shahr-e Naw, à Kaboul, Afghanistan, 4 octobre 2021. Crédit : Reuters
Des familles afghanes déplacées, qui fuient la violence dans leurs provinces, se tiennent près de tentes dans un abri de fortune au parc Shahr-e Naw, à Kaboul, Afghanistan, 4 octobre 2021. Crédit : Reuters

Dans une directive mise à jour début octobre, le Home Office, l'équivalent du ministère de l'Intérieur, revoit sa position sur la demande d'asile des Afghans. La situation de violence dans le pays y est jugée restreinte, les ressortissants devront dès lors démontrer des "motifs spécifiques" de persécution pour demander une protection internationale. Pour les ONG et avocats spécialisés, la voie est ouverte à la reprise des retours forcés.

C'est une mise à jour de la position du Home Office qui inquiète : début octobre, l'équivalent du ministère de l'Intérieur au Royaume-Uni a publié sa directive "Security and humanitarian action" sur l'Afghanistan. Ce document sert de base à la politique intérieure de l'asile. Or, il y est spécifié, désormais, que la situation en Afghanistan "ne représente pas un réel risque de préjudice".

Cette nouvelle orientation ouvre la voie, aux yeux des défenseurs des droits humains, à la reprise des expulsions. “De manière regrettable, ce document semble laisser le champ libre au Home Office pour renvoyer les gens en Afghanistan, ce qui devrait être impensable à l'heure actuelle" s'indigne l'avocat Alasdair Mackenzie auprès de The Independent, qui a déniché l'information.

>> À (re)lire aussi : Le Royaume-Uni promet d'accueillir 20 000 Afghans tout en durcissant sa politique d'asile

La mise à jour du document intervient quelques semaines après que le Royaume-Uni ait évacué près de 14 500 Afghans, au cours du mois d'août. Le gouvernement avait également promis d'accueillir "à terme" 20 000 d'entre eux. Aujourd'hui, près de 3 000 dossiers de demande d'asile déposés par des Afghans sont en cours de traitement dans le pays.

Remise en cause de la "violence aveugle" et du "conflit armé"

Dès les premières pages du document, le Home Office rappelle qu'entre le 1er janvier et le 30 juin 2021, "5183 civils ont été tués ou blessés : une augmentation de 47 % par comparaison avec la même période en 2020". Mais on y lit ensuite que la progression des Taliban (suite à l'annonce du retrait des troupes américaines), jusqu'à la prise de Kaboul le 15 août, s'est faite "avec peu ou pas de combat ni de résistance" de la part des forces nationales. Conclusion : "La question est ouverte de savoir s'il existe encore une 'situation de conflit armé international ou intérieur' en Afghanistan", tranche le Home Office.

L'organisme en déduit que, si violence aveugle il y a, "ce n'est que dans certaines zones de l'Afghanistan". Dès lors, les demandeurs d'asile afghans ne pourront prétendre à une protection internationale du fait d'être des civils affectés par une situation de violence aveugle. Ils devront démontrer des "motifs spécifiques" de persécution.

>> À (re)lire aussi : Le message ambivalent de Londres face aux migrants afghans

Ces causes spécifiques peuvent, certes, englober des catégories de la population discriminées : par exemple, les personnes LGBT+ ou des minorités ethniques. Mais pour le directeur du Scottish Refugee Council, cité par The Independent, "il y a un grand nombre de personnes dont les vies sont menacées pour de multiples raisons, et que cette directive n'inclut pas". Avant de conclure : "L'Afghanistan n'est tout simplement pas un pays sûr."

Contacté par InfoMigrants, le Home Office n'a pour l'heure pas répondu à nos questions. À The Independent, un porte-parole a assuré que cette directive ne revenait pas à imposer des retours forcés aux Afghans déboutés du droit d'asile.

 

Et aussi