Depuis Bruxelles, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Layen, a adressé à plusieurs pays de l'Union européenne une fin de non recevoir : l'Union européenne n'octroiera pas de financements pour la construction de murs et de barbelés à ses frontières. Récemment, la Pologne et la Lituanie avaient adressé à l'UE des factures pour l'érection de futures clôtures.
"J'ai été très claire […] il n'y aura pas de financement de barbelés et de murs". La réponse de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen aux dirigeants qui l’avaient sollicitée sur la question est catégorique. L’Europe ne financera pas les clôtures anti-migrants aux frontières de l’UE.
Face à l’afflux d’exilés en provenance la Biélorussie, plusieurs pays ont en effet décidé de renforcer leur frontière avec ce type de clôtures, à l’image de la Pologne. Depuis cet été, Varsovie multiplie les initiatives, dans le but de rendre sa frontière hermétique. D’abord avec l’installation, à divers endroits, de longs fils de fer barbelés.
Le 14 octobre, le Parlement polonais est allé plus loin, en validant une loi prévoyant la construction d’un mur. Des détecteurs de mouvement, visant à empêcher quiconque de s'approcher à moins de 200 mètres, seront également installés. Coût total du dispositif ? 353 millions d’euros. La semaine dernière, Varsovie a tendu la facture à l’UE. Qui, par la voix d’Ursula von der Leyen, l’a donc refusée.
"Empêcher les passages clandestins"
Mais l’initiative polonaise a aussi ses défenseurs. Même si l'Allemagne a exclu de construire un mur, le pays a néanmoins approuvé par la voix de son ministre de l'Intérieur allemand, Horst Seehofer, la démarche polonaise. "Il nous semble légitime de protéger la frontière extérieure [de l'UE, NDLR] de façon à empêcher les passages clandestins", a-t-il déclaré au tabloïd Bild. Le ministre a d’ailleurs fait savoir que les contrôles à la frontière avec la Pologne allaient être renforcés, et que des forces de polices de 800 personnes avaient déjà été déployées.
Et "si cela est nécessaire, je suis prêt à les renforcer encore davantage", a-t-il assuré. Selon des chiffres du ministère de l'Intérieur allemand, au moins 5 700 personnes ont traversé la frontière entre le pays et la Pologne illégalement depuis le début de l'année.
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Le ministre de l'Intérieur allemand a écrit à son homologue polonais Mariusz Kaminski la semaine dernière pour lui proposer d'accroître les patrouilles communes le long de la frontière, face au nombre croissant de migrants. En retour, il a obtenu son "plein soutien".
Des barbelés en Lituanie, en Hongrie, en Croatie...
À environ 1 000 km de là, en Lituanie, ériger des fils barbelés à la frontière est également approuvé par les autorités. La mesure a été jugée "des plus nécessaires à court terme pour gérer cette crise" par le président Gitanas Nauseda. Il a lui aussi été soutenu à Bruxelles par le nouveau chancelier autrichien Alexander Schallenberg, qui a estimé que "si la Lituanie construit une barrière [...] elle devrait pouvoir compter sur notre solidarité. Ce n'est pas aux contribuables lituaniens de financer cela seuls".
La Hongrie avait quant à elle érigé ce type de barrière à la frontière avec la Serbie et la Croatie, pays membre de l'UE mais qui n'est pas dans Schengen, lors de la crise migratoire de 2015. La Slovénie a fait de même avec la Croatie.
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Le 7 octobre déjà, les ministres de l’Intérieur de douze pays européens - Autriche, Bulgarie, Chypre, Danemark, Estonie, Grèce, Hongrie, Lituanie, Lettonie, Pologne et République tchèque, Slovaquie – ont formulé la même demande. "Une barrière physique apparaît comme une mesure de protection des frontières efficace, qui sert les intérêts de l'ensemble de l'UE, pas seulement les États membres en première ligne", avaient-ils indiqué à la Commission.
La commissaire aux Affaires intérieures Ylva Johansson avait alors répondu que les pays avaient "la possibilité et le droit de construire des clôtures". "Mais quant à savoir si on devrait utiliser les fonds européens qui sont limités, pour financer la construction de clôtures à la place d'autres choses tout aussi importantes, c'est une autre question", s'était-elle contentée d'indiquer.
Ce vendredi, à l'issue du sommet des Vingt-Sept à Bruxelles, elle a été bien plus catégorique. Reste à savoir si elle le sera aussi en ce qui concerne le traitement des demandeurs d’asile aux frontières de l’UE. Le 20 octobre, une quinzaine de migrants ont tenté d’entrer en Pologne après avoir détruit une partie de la clôture de fils barbelés qui les sépare de la Biélorussie. En réponse, ils ont été arrêtés, traînés dans la boue et gazés par les garde-frontières polonais.