Dimanche, des centaines de migrants, qui se sont installés début octobre devant les locaux du Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés à Tripoli, ont manifesté pour réclamer leur évacuation de Libye. Des violences ont émaillé le rassemblement : les migrants accusent l'agence onusienne, qui elle pointe du doigt la responsabilité des manifestants.
La situation devant le centre du Haut-commissariat des réfugiés aux Nations unies (HCR) à Tripoli ne cesse d’empirer. Depuis deux mois, des centaines de migrants, dont des femmes et des enfants, se sont installés devant les locaux de l’organisation pour réclamer leur évacuation de Libye et leur réinstallation dans un pays tiers. Certains sont des demandeurs d'asile ou des réfugiés.
Installés à même le sol, parfois sous des tentes improvisées avec des morceaux de tissu ou de cartons, ces exilés passent leurs journées et leurs nuits sur des bouts de trottoirs de Tripoli aux abords du mur d’enceinte de l’agence onusienne, aussi appelé CDC pour Community day center. Le lieu a fermé au début du mouvement, début octobre, face à l’affluence d’un trop grand nombre de personnes.
Une "violence inacceptable"
Leurs conditions de vie se sont encore aggravées ces derniers jours avec l’arrivée du froid et de la pluie. De fortes précipitations ont inondé les habitations de fortune. Pour tenter de se réchauffer, certains migrants ont allumé des feux avec des petits morceaux de bois trouvés dans les alentours.
"Des conditions extrêmes", selon un migrant sur place, qui tend la population. Tout comme "l’absence de solutions proposées" par le HCR.
Dimanche 5 décembre, les exilés ont manifesté "pacifiquement", disent-ils, devant le bâtiment de l’organisation pour "maintenir la pression" et "demander d’accélérer le traitement des dossiers de réinstallation", explique à InfoMigrants Ousmane, un Soudanais de 27 ans qui participe au mouvement.
Lors de ce rassemblement, des violences ont éclaté. Difficile de savoir exactement ce qu’il s’est passé, tant les versions divergent. Selon le HCR, certaines personnes ont mis le feu devant le centre. "La police est venue pour éteindre l’incendie et ils ont reçu des pierres", jetées par les manifestants, assure dans une vidéo le chef de mission du HCR en Libye Jean-Paul Cavalieri. "Cette violence est inacceptable", estime-t-il.
"Le HCR ment"
Les migrants, eux, ont un tout autre discours. "Le HCR ment, ils n’ont aucune preuve de ce qu’ils avancent alors qu’il y a des caméras de surveillance [devant le centre, ndlr]. Pourquoi ne diffusent-ils pas les images ?", dit en anglais un exilé dans une vidéo diffusée sur le compte Twitter Refugees in Libya, qui depuis le début de l’occupation informe sur la situation devant le centre.
D’après les migrants, les policiers ont débarqué et ont tenté d’éteindre un feu de fortune allumé pour se protéger du froid. Ils auraient ensuite interpellé certains d’entre eux et auraient été violents.
Sur des images tournées devant les locaux du HCR et diffusées sur Twitter par les exilés, on peut voir des hommes en uniforme avec une veste portant l’inscription "police" frapper violemment des migrants à l’aide de matraques ou de bâtons. Certains brandissent des couteaux et des armes.
"Ce qu’il s’est passé est une violation de nos droits. On demande simplement la protection et le respect", insiste un migrant.
Par ailleurs, une petite fille de six ans, originaire du Soudan, est à l'hôpital après avoir été percutée par une voiture. Ce n'est pas la première fois qu'une personne est renversée devant le centre. Fin octobre déjà, un Érythréen avait été conduit à l'hôpital après un accident de la route.
À la même période, plusieurs personnes avaient été blessées après des coups portés, d'après les témoignages des exilés, par des agents de sécurité du HCR. Le 12 octobre, un Soudanais avait été tué par balle à quelques mètres du centre.