À Boulogne-sur-Mer, dans le nord de la France, un hangar pourra désormais être utilisé pour débarquer les migrants sauvés dans la Manche. L'ouverture d'un tel lieu, équipé d'une cellule médicale, était attendue de longue date par les secouristes qui pointent le manque de prise en charge digne de ces migrants.
À Boulogne-sur-Mer, dans le nord de la France, un hangar jusqu'à présent vide est désormais mis à disposition des migrants secourus dans la Manche. Situé sur le port de commerce, il s'agit d'un lieu où les rescapés pourront être débarqués par les équipes de secours. Selon des informations relayées dans la presse locale, il peut accueillir plusieurs centaines de personnes, une cellule médicale y sera installée, et des vivres ainsi que des vêtements peuvent y être stockés.
Grâce à cet espace, les naufragés pourront notamment changer leurs habits mouillés à l'abri des regards. Un détail qui a une grande importance. À l'origine de cette initiative, Gérard Barron, président de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) de Boulogne-sur-Mer, évoque en effet le manque d'intimité qui accompagne généralement les débarquements de migrants secourus dans la Manche.
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"En juillet, nous avions débarqué des migrants au port sans qu'il y ait la moindre prise en charge. Ils étaient partis trempés, pieds nus. Nous étions choqués", explique Gérard Barron, interrogé par InfoMigrants. Ce dernier se souvient également d'une photo publiée en Une d'un journal local il y a quelques mois, sur laquelle on pouvait voir un migrant tout juste secouru uniquement vêtu d'un slip.
"Ce n'est pas normal. C'est indécent. On ne peut pas débarquer ces gens désespérés, qui sont souvent en mauvais état physique et dépenaillés, dans des conditions aussi indiscrètes. Il faut que leur condition humaine soit respectée", peste encore le sauveteur, qui avait décidé en juillet d'aller se plaindre au maire de la ville, Frédéric Cuvillier, provoquant une prise de conscience des autorités. "Je suis reconnaissant envers l'État de nous permettre d'avoir désormais un endroit qui correspond à ce besoin humanitaire."
Livrés à eux-mêmes
Ce nouveau dispositif vient compléter le travail effectué par la Protection civile à Boulogne-sur-Mer, où sont centralisés les sauvetages menés dans toute la région. Cette organisation composée de bénévoles, et sollicitée par les services de l'État, met à disposition des migrants des tentes et des équipes médicales à leur retour sur la terre ferme. Mais cette solution n'est pas systématiquement mise en place.
"Les équipes de la Protection civile viennent de Berck [à 50 kilomètres de Boulogne-sur-Mer, ndlr], il leur faut une bonne heure pour être là. Si la préfecture ne fait pas le nécessaire en temps et en heure pour les prévenir de l'arrivée de naufragés, ils ne sont pas présents", explique encore Gérard Barron.
Dans ce cas, les migrants sont régulièrement livrés à eux-mêmes, contraints de revenir à pieds vers Calais, "dégoulinants d'eau", expliquaient à InfoMigrants des associations en février dernier. Il arrive aussi que ces associations soient directement contactées par les membres de la police aux frontières (PAF) pour leur demander de venir chercher les migrants.
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La solution qu'offre désormais le hangar est temporaire. À partir de l'été prochain, un nouveau lieu, plus pérenne, devrait être dédié à cet effet.
Le nombre de migrants secourus au large de Calais et pris en charge par l'État a triplé en 2021, année record des tentatives de traversées clandestines de la Manche, a indiqué lundi l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'année a également été marquée par une forte hausse des décès en mer. Le 24 novembre, 27 personnes sont mortes dans le naufrage de leur embarcation au large de Calais, pire bilan jamais enregistré dans la Manche.