À partir du 1er juillet 2022, les ONG et les journalistes pourront à nouveau s'approcher de frontière polono-biélorusse, jusque là interdite d'accès par le gouvernement. Pendant des mois, aucun civil n'a pu entrer dans la zone boisée, notamment pour porter secours aux milliers de migrants qui s'y trouvaient. Cet hiver, de nombreux corps d'exilés avaient été retrouvés dans cette "zone rouge", probablement morts de froid.
Jeudi 9 juin, le ministre polonais de l'Intérieur a annoncé la levée, le 1er juillet 2022, de l'interdiction d'accès à la frontière polono-bélarusse - qui avait été imposée en septembre 2021 pour empêcher les migrants de pénétrer sur son territoire.
Cependant, la zone ne sera pas totalement libre d'accès. Il sera toujours interdit d'approcher à moins de 200 mètres la ligne de la frontière, ont précisé les autorités dans un communiqué. Depuis le mois de septembre, ni les ONG ni les civils ni les médias ne pouvaient pénétrer dans la zone boisée et marécageuse large d'environ 3 km et longue de plus de 400 km.
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Selon les garde-frontières polonais, 39 700 tentatives d'entrées illégales de migrants depuis la Biélorussie ont été comptabilisées sur l'année 2021, dont près de 17 000 sur le seul mois d’octobre.
Sans assistance, ces hommes, ces femmes et ces enfants ont tenté de survivre dans le froid. Mais il y eut des drames. Cet hiver, une vingtaine de corps de migrants ont été trouvés dans la forêt, selon le quotidien britannique The Guardian. La plupart d'entre eux sont probablement morts de froid.
Pendant des mois, l'existence de cette "zone rouge" avait été dénoncée par la justice, dont la Cour suprême, et par des organisations humanitaires. Plusieurs journalistes s’étaient fait interpeller ou ont été jugés pour avoir pénétré, même involontairement, dans cette zone. Des activistes se sont eux plaints de "persécutions" de la part de l'armée et de la police polonaises.
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Dans le même temps, des membres de la Commission européenne ont pointé le caractère "illégal" des refoulements qui s’y déroulaient. InfoMigrants avait documenté ces expulsions pratiquées à l'abri des regards.

Caméras et détecteurs de mouvements
La Pologne, qui a accueilli à bras ouverts près de 4 millions d'Ukrainiens fuyant l'invasion russe, n'a rien changé à sa politique de refoulement de migrants originaires principalement du Moyen-Orient. Le pays poursuit en ce moment la construction d'une nouvelle clôture à la frontière biélorusse, pour bloquer la pénétration d’exilés indésirables.
Longue d'environ 186 km, soit près de la moitié de la longueur totale de la frontière de 418 km, la barrière métallique haute de cinq mètres et demi doit être équipée de caméras et de détecteurs de mouvement. Son coût est estimé à quelque 353 millions d'euros.
Le projet a suscité des inquiétudes des défenseurs des droits humains et de l'environnement. Les premiers craignent que des migrants fuyant des situations de conflit ne soient pas en mesure de présenter une demande d'asile, et les seconds des effets néfastes pour la faune et la flore de la zone forestière à la frontière.
L'Occident a accusé le régime biélorusse d'avoir orchestré une crise migratoire à cette frontière en y laissant sciemment passer des migrants désireux de gagner l'Union européenne, ce que Minsk dément.