Des commémorations ont eu lieu hier pour rendre hommage aux 368 migrants décédés en 2013 dans le naufrage de leur embarcation près de l’île italienne de Lampedusa.
Il y a neuf ans, avait lieu l’un des plus importants drames migratoires identifiés en Méditerranée : « le naufrage du 3 octobre » comme on l’appelle encore aujourd’hui avait fait au moins 368 morts, dont 83 femmes et 9 enfants. Ils venaient en majorité d'Erythrée et de Somalie.
Le nombre de victimes a marqué les esprits, tout comme les circonstances de cet accident en mer. Le bateau qui transportait quelques 500 migrants a coulé à moins d’un kilomètre du rivage, pourtant les garde-côtes italiens n’étaient arrivés sur place que 45 minutes après avoir été alertés par un bateau de pêche.
Hommages aux victimes
Des commémorations ont eu lieu à Lampedusa hier pour rendre hommage aux disparus en cette date anniversaire de ce naufrage devenue « journée nationale du souvenir des victimes de l’immigration » en Italie. En Tunisie, une journée de deuil national avait également été décrétée un mois après ce drame, le 3 novembre 2013, à la mémoire des migrants clandestins africains.
Les agences onusiennes (haut commissariat pour les réfugiés, HCR, Office international des migrations, OIM, et le fonds pour l’enfance, UNICEF) réclament désormais dans un communiqué commun que le 3 octobre devienne officiellement une journée européenne du souvenir et de l’accueil.
"Il est inacceptable que des enfants, des femmes et des hommes, des personnes fuyant les guerres, les violences et les persécutions, continuent de perdre la vie en Méditerranée", a souligné à cette occasion Chiara Cardoletti, représentante du HCR en Italie. Et d’appeler l’Europe à « s’équiper d’un mécanisme étatique plus prévisible et efficace pour la recherche et le sauvetage en mer et faire en sorte que ceux qui arrivent en quête de protection puissent en trouver et reconstruire leur vie dans la dignité ».
La Méditerranée centrale, route toujours plus mortelle
« Si ce n’est son extrême proximité de la côte, rien ne distingue le terrible naufrage survenu à Lampedusa le 3 octobre 2013 de ceux qui l’ont précédé ou suivi », écrivait en décembre 2013 la chercheuse spécialiste des migrations Claire Rodier, appelant les pays européens à leurs responsabilités. Et de dresser une « macabre énumération » d’autres cas de disparitions de migrants clandestins en mer : dont deux naufrages de 200 personnes en 2010 ou encore la noyade de 200 syriens le 11 octobre 2013.
Or, neuf ans plus tard, près de 25000 migrants et demandeurs d'asile ont perdu la vie en Méditerranée souligne le communiqué commun des organisations onusiennes. La grande majorité – près de 20 000- personnes sont mortes en prenant la « route de la Méditerranée centrale ».
Cette traversée au départ principalement des côtes tunisiennes et libyennes vers l’Italie reste « la plus mortelle au monde », selon SOS Méditerranée. L’association explique ce phénomène par « la très grande distance (300 à 400 km) qui sépare les côtes de la Libye et celles de l’Italie », « le manque cruel de capacités de recherche et de sauvetage étatiques » déployées dans la zone, ainsi que « les entraves à l'encontre des navires des ONG et une coordination déficiente, voire inexistante, des garde-côtes libyens ».
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Rien qu’en 2022, 1400 personnes sont déjà décédées ou portées disparues en Méditerranée, stipulent le HCR, l’OIM et l’UNICEF, toujours en écrasante majorité sur cette même route de Méditerranée centrale.
Lampedusa, un hotspot débordé
Particulièrement touchée par les arrivées massives de migrants, l’île de Lampedusa voit ses structures d’accueil débordées. Son centre d’hébergement d’une capacité de 350 places recevait quelque 1400 personnes en juin dernier.
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Entre janvier et mai dernier, près de 12 000 exilés étaient arrivés en Italie, selon les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
C'est dans ce contexte que le discours anti-immigration a gagné du terrain dans le pays, porté désormais par Giorgia Meloni, candidate d'extrême-droite victorieuse aux dernières élections législatives.