Entrée du CRA de Nice (Alpes-Maritimes). Crédit : capture d'écran/Google Maps
Entrée du CRA de Nice (Alpes-Maritimes). Crédit : capture d'écran/Google Maps

À l'issue d'une visite à Nantes, dans l'ouest de la France, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a annoncé qu'un centre de rétention administrative (CRA) verrait bientôt le jour dans la région, "dans les délais les plus rapides". Une décision dans la continuité de la politique migratoire voulue par le gouvernement, qui ambitionne d'ouvrir toujours plus de places dans ces centres pourtant très décriés.

Bientôt un CRA à Nantes ? C’est que laisse penser la toute dernière phrase d’un communiqué conjoint du ministère de l’Intérieur et de la ville de Nantes, publié mardi 4 octobre. "Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer a décidé l’installation d’un centre de rétention administratif dans le département de la Loire-Atlantique dans les délais les plus rapides", est-il indiqué.

Celui-ci a été diffusé à l’issue d’une rencontre entre le ministre Gérald Darmanin et la maire de Nantes Johanna Rolland, pour convenir "d’un plan commun de renforcement des moyens au service de la sécurité des Nantais".

Contacté par InfoMigrants, le ministère de l'Intérieur assure "ne pas avoir d'informations supplémentaires à ce sujet pour le moment". Mais selon une source contactée par le journal Ouest-France, "cela faisait plusieurs années que l’État réfléchissait à l’implantation d’un centre de rétention administrative en Loire-Atlantique. Le préfet en aurait reparlé tout récemment".

Actuellement, le CRA le plus proche de la métropole nantaise est situé à Rennes, à une centaine de kilomètres. "Or, le transfert vers Rennes des personnes expulsées, sous le coup d’une obligation de quitter le territoire (OQTF), mobilise des moyens policiers", affirme le journal.

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Si le député macroniste nantais Mounir Belhamiti enjoint les autorités locales à "se mettre à la disposition de l’État pour étudier au plus vite la localisation de ce futur centre", son collègue de la France Insoumise Andy Kerbrat, lui, fustige auprès de Ouest France cette décision dont l’unique motivation serait de "satisfaire une aile droitière". "Les centres de rétention ne servent à rien, assure-t-il. On se retrouve dans des situations aberrantes où des personnes, placées dans un centre, en ressortent sans avoir été reconduites aux frontières puis y retournent, puis en ressortent".

Un enfermement "inhumain"

L’annonce de la création prochaine de ce CRA s’inscrit dans le "plan ambitieux d'ouverture de places en centres de rétention administrative (CRA)" voulu par le projet de loi de finances (PLF) du gouvernement, et dévoilé le 26 septembre. Et ce, alors même qu'en quatre ans, la France a déjà doublé ses capacités d’accueil en CRA.

La création de nouveaux centres à venir près Orléans, à Bordeaux et en région parisienne portera à 2 157 le nombre de places en CRA, contre 1 069 en 2017.

Pourtant, les conditions de vie actuelles dans ces structures – destinées à maintenir dans un lieu fermé un étranger qui fait l'objet d'une décision d'éloignement, dans l'attente de son renvoi forcé - sont régulièrement décriées. Période de rétention à rallonge, nourriture insuffisante, conditions matérielles vétustes et normes sanitaires peu respectées : un rapport de la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGPL) publié le 2 juin y déplore un enfermement "inhumain".

Un état de fait qu'a pu constater mi-septembre InfoMigrants, auprès des exilés du CRA de Paris-Vincennes. Bien qu’une unité médicale, plus couramment appelée infirmerie, y fonctionne 20 heures sur 24, les retenus souffrent de leur enfermement. "Je deviens malade dans ma tête", avait glissé A., au milieu du petit hall qui donne sur le couloir des chambres, dans le CRA 1. "J'ai demandé à voir un psychologue, mais il n'y a personne ici."

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En 2021, alors que les vagues de Covid-19 se succédaient, 42 353 personnes ont été privées de liberté dans les CRA en France, dont 26 485 dans le seul centre de Mayotte, affirme le dernier rapport de la Cimade sur les lieux de rétention. Et depuis 2017, au moins sept personnes retenues dans ces centres sont mortes. Le dernier décès en date remonte à fin novembre 2021, quand un homme enfermé à Rouen a mis fin à ses jours.

 

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