Les autorités lituaniennes viennent d'annoncer la fin de la construction d'un mur tout le long de la frontière avec la Biélorussie. Entamé à l'été 2021, ce mur équipé d'un système de vidéosurveillance vise à freiner les arrivées de migrants, dans un contexte de forte tension avec Minsk autour de cette route migratoire.
Quatre mètres de hauteur, 60 centimètres de fils barbelés, un système de vidéosurveillance : telles sont les caractéristiques du mur qui vient d'être achevé entre la Lituanie et la Biélorussie. Celui-ci s’étend sur près de 550 kilomètres, tout le long de la frontière entre ces deux pays.
Fin août, la première étape du mur, à savoir la clôture de fils barbelés, s'était achevée. "Ce sont des barbelés avec des fils tranchants, des fils rasoirs, pour que les migrants en situation irrégulière, qui viennent d’en face, ne puissent pas passer", décrivait un superviseur du chantier à une équipe de France Info sur place. Quelque 600 ouvriers étaient alors mobilisés sur le chantier.
Ce mur est une réponse à l'augmentation des traversées de la frontière depuis la Biélorussie, porte d'entrée de l'Union européenne (UE). En tout, 4 200 personnes seraient arrivées illégalement en Lituanie entre fin 2021 et fin 2022.
Tensions entre Minsk et Vilnius depuis l'été 2021
La construction de ce mur avait été annoncée et commencée en juillet 2021. Cet été-là, 1 500 personnes étaient arrivées en Lituanie depuis le début de l'année, contre seulement 81 pour l'ensemble de 2020 et 37 en 2019. Le pays balte de 2,8 millions d'habitants, membre de l'Union européenne et de l'Otan, avait alors sollicité l'aide de Frontex pour contrôler sa frontière. Une mission y avait été déployée.
Cette hausse des arrivées s'inscrit dans un contexte de forte tension entre la Lituanie et la Biélorussie. Suite à l'élection frauduleuse d'Alexandre Loukachenko à la tête de la Biélorussie, l'UE avait pris une série de sanctions en 2021. En guise de représailles, Minsk aurait volontairement encouragé l'arrivée d'exilés du Moyen-Orient puis facilité leurs traversées des frontières pour entrer dans l'UE, estiment les autorités européennes.
"Il y a des agences de voyages, des vols directs qui relient Minsk à Bagdad par exemple, et il y a des agences à la fois en Biélorussie et dans d'autres pays qui opèrent et attirent des 'touristes' à Minsk", défendait à l'été 2021 la Première ministre lituanienne, Ingrida Simonyt.
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Ce même été, le Parlement lituanien avait aussi réagi en adoptant une loi autorisant la détention à grande échelle des demandeurs d’asile. InfoMigrants a recueilli les témoignages de plusieurs exilés enfermés dans des centres près de la frontière, dans des conditions très difficiles. L'ONG Médecins sans frontières s'était dite "extrêmement préoccupée" par ces détentions arbitraires, dénonçant les "conditions inhumaines" dans lesquelles sont retenus les exilés.
Déjà "350 cas de dégradation" du mur
Depuis lors, les tensions avec le voisin biélorusse n'ont pas cessé. Le mur fait par exemple l'objet de dégradations par les garde-frontières biélorusses depuis le début de la construction, répètent les autorités lituaniennes.
Les garde-frontières lituaniens assurent avoir recensé 350 cas de dégradations. "Récemment, nous avons remarqué que la barrière physique était endommagée précisément là où il n'y a actuellement aucun système de vidéosurveillance", a précisé Rimantas Petrauskas, adjoint au chef des garde-frontières lituanien, à Euronews. Rien qu'au cours de l'été, alors que seule la clôture de barbelés était achevée, "95 cas de dommages ont été enregistrés", avait pour sa part indiqué Rustamas Liubajevas, le commandant des garde-frontières lituaniens.
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Ce durcissement de la frontière est commun aux autres pays voisins de la Biélorussie, comme la Pologne et la Lettonie, également concernés par cette pression sur les routes migratoires. En juillet, le Premier ministre polonais avait lui aussi inauguré un mur de près de cinq mètres de haut le long de la frontière biélorusse.