Nombreux sont les migrants déboussolés lorsque, quelques jours après avoir été arrêtés par la police aux frontière et enfermés en zone d’attente, ils se retrouvent devant un tribunal. InfoMigrants donne ici quelques pistes pour mieux comprendre le passage devant le juge des libertés et de la détention (JLD).
En France, le juge des libertés et de la détention (JLD) est un magistrat chargé, entre autres, de veiller à ce que les droits des personnes enfermées ne soient pas bafoués.
C’est dans ce contexte, qu’il entend régulièrement des étrangers, placés en zone d'attente après avoir été interpellés par la police aux frontières française parce qu’ils n’avaient pas pu présenter de titre de séjour ou de visa valide. La France compte une centaine de zones d'attente, majoritairement situées dans les aéroports, mais aussi dans des ports et certaines gares.
Interpellés dès leur descente du train ou au pied de l'avion dans lequel ils se trouvent, les "étrangers non-admis sur le territoire français", y sont enfermés pour une durée maximale de 20 jours, jusqu'à ce que leur situation administrative soit clarifiée ou qu'ils soient renvoyés dans le pays de provenance.
Présentation devant le juge au bout de 4 jours
La loi française veut qu’au bout des quatre premiers jours, le migrant enfermé en zone d’attente soit présenté devant le juge des libertés et de la détention, si la police demande une prolongation du maintien en zone d'attente. C’est le juge qui va décider si l'enfermement est prolongé ou si l’étranger est libéré.
Pour cela, il contrôle la régularité de la procédure qui a conduit au placement en zone d'attente de l’étranger "non-admis sur le territoire français", depuis son interpellation à la frontière.
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Le JLD devra, à nouveau, donner son accord 8 jours plus tard, en cas de deuxième demande de prolongation de la détention par la police. Cette nouvelle prolongation sera de 8 jours maximum également. Au total, le maintien en zone d'attente ne peut excéder les 20 jours, sauf en cas de dépôt de demande d’asile.
Pour son passage devant le juge, le migrant en zone d'attente est acheminé au tribunal administratif. Parfois une salle de tribunal est collée à la zone d’attente, comme pour la "Zone d'attente pour personnes en instance" (ZAPI) située à l’aéroport parisien de Roissy-Charles de Gaulle, ou encore à Marseille. Dans la plupart des cas, le tribunal se situe en ville.
Le passage devant le juge n'est pas suspensif d'une expulsion
"Dans les zones d’attente, les gens ne comprennent pas pourquoi on les envoie devant le tribunal, car c’est une procédure parallèle à l’éloignement", explique à InfoMigrants Laure Palun directrice de l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé), une organisation en contact direct avec les personnes enfermées en zone d'attente et à qui elle propose un soutien juridique.
En effet, parallèlement aux passages réguliers et réglementés devant le JLD, les migrants considérés en situation irrégulière et n’ayant pas formulé de demande d’asile ou ayant été refusés dans la procédure d’asile à la frontière, risquent une expulsion.
"Il arrive, indique Laure Palun, que des personnes soient éloignées dans la nuit précédant leur passage devant le juge".
Par ailleurs, avant leur passage devant le JLD, les migrants reçoivent une convocation pour les prévenir, mais celle-ci est rédigée en français, donc "dans la plupart des cas les gens ne comprennent pas de quoi il s'agit", constate la directrice de l'Anafé.
Hors la loi au bout de 8 jours à la sortie de la zone d'attente
Lorsque le JLD prononce la fin de la détention, la sortie de la zone d'attente peut durer "un certain temps", souligne encore Laure Palun, car le procureur dispose de 10 heures suivant la décision du juge pour faire appel. En cas d’appel, les migrants concernés restent enfermés le temps que la cour d’appel rejette la requête du procureur, ce qui peut durer entre 24 et 48 heures.
À leur libération, les migrants sortis de la zone d’attente peuvent entrer sur le sol français (la zone d'attente étant considérée hors du territoire français) avec un visa de 8 jours seulement. "Au bout de 8 jours, ils seront considérés comme étant en situation irrégulière pour l'administration française", avertit Laure Palun.
Aussi, les personnes désirant demander l’asile en France doivent lancer la procédure de demande d’asile dans les 8 jours suivants, en appelant ou en se rendant dans une Structure de Premier Accueil des Demandeurs d'Asile (SPADA). Pour ceux qui ne veulent pas demander l’asile, et souhaitent rester en France, les démarches de demande de titre de séjour doivent être faites auprès d’une préfecture.
Dans les deux cas, le délai est quasiment impossible à respecter étant donné les temps d'attente pour obtenir un rendez-vous en préfecture ou la difficulté pour joindre un SPADA en France à l'heure actuelle.