Les deux voitures du maire de Saint-Brévin, près de Nantes, ont été incendiées mercredi matin, manquant de se propager à sa maison. La piste accidentelle est écartée par les enquêteurs. Les regards se tournent désormais vers des militants d’extrême-droite, qui protestent contre l’installation prochaine dans la commune d’un centre d'accueil pour demandeurs d’asile.
L’issue aurait pu être plus grave. Mercredi 22 mars à l’aube, les deux véhicules du maire de Saint-Brévin, une petite ville bretonne près de Nantes, ont été totalement incendiés. Le feu a failli se propager au domicile de Yannick Morez. "Nous avons entendu comme une explosion. Quand je suis sorti, le feu avait pris en même temps dans les deux voitures au niveau des bas de caisse. Je me suis dit qu’un cocktail molotov avait été lancé", a déclaré l’élu au Parisien.
Des passants, "trois salariés d’Airbus partant au travail" précise le parquet de Saint-Nazaire, ont appelé les pompiers, qui sont vite intervenus. Ils ont également sonné à la porte du maire. Ce dernier dormait au moment de l’incendie. "La chaleur était telle que des choses ont fondu à 3 ou 4 mètres, vous imaginez. Sans [les passants], les conséquences auraient pu être encore plus dramatiques", a réagi Yannick Morez. Il se dit "choqué par cette attaque lâche et inadmissible" et a porté plainte.
La cause accidentelle écartée
Le parquet a immédiatement ouvert une enquête. La cause accidentelle a rapidement été écartée. C’est donc désormais la piste criminelle qui est privilégiée par les enquêteurs. Très vite les regards se sont tournés vers des militants d’extrême-droite. En effet, ces derniers temps, la ville est la cible d’attaques. La cause ? La volonté du maire de construire un CADA (centre d’accueil pour demandeurs d’asile) à Saint-Brévin. Depuis cette annonce, les élus reçoivent régulièrement des mails de menaces et des menaces de morts sur les réseaux sociaux. Des tracts ont été envoyés directement dans la boite aux lettres personnelle de Yannick Morez.
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Fin février, une centaine d’opposants au projet ont manifesté dans la ville, brandissant des drapeaux du parti d’Éric Zemmour, "Reconquête". Des saluts nazis et des slogans fascistes italiens ont été rapportés par des journalistes locaux.
Messages de soutien
La tension est donc montée d’un cran cette semaine, et a braqué les projecteurs sur cette petite commune bretonne. Le maire a reçu ces dernières heures des centaines de messages de soutien d’anonymes, de politiques, d'associations et d’organisations syndicales.
La Nupes de Loire-Atlantique a salué dans un communiqué "la constance et le courage de l’engagement humaniste de Yannick Morez". La maire PS de Nantes, Johanna Rolland, a estimé que ces "violences graves, et menaces, sont intolérables et insupportables". Elle demande que "les auteurs" soient "identifiés et condamnés".
Les organisations syndicales et associations réunies dans le Collectif de lutte pour les droits et les libertés ensemble contre les idées et les actes des extrêmes droites (CLECED) voient dans cette attaque "un avertissement pour toutes celles et ceux qui soutiennent les personnes exilées […] et entendent continuer à se mobiliser auprès de Yannick Morez et de ses adjoints pour que la démocratie locale perdure et ne soit en aucun cas menacée". Pour l’association d’aide au migrants Utopia 56, "il est là le vrai défi d’une nation, combattre la haine".
D’autres villages réfractaires aux CADA
Car Saint-Brévin n’est pas un cas isolé. D’autres villages doivent composer avec l’hostilité d’une partie de la population, opposée à l’ouverture d’un CADA. En Corrèze par exemple, la commune de Beyssenac fait face à des tensions depuis plusieurs semaines. La préfecture fait face au collectif "Sauvons Beyssenac" composé d’une cinquantaine de personnes. Soutenu par les partis d’extrême-droite Reconquête et les Patriotes, le collectif milite pour l’annulation du projet.
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Le Rassemblement national s'est aussi saisi du sujet en montant son propre collectif "Non au CADA Beyssenac". Le 25 février, une manifestation à l'initiative du mouvement nationaliste l’Action Française a rassemblé une trentaine de personnes aux cris de "On est chez nous", selon le journal La Montagne. Du jamais vu dans le coin.