Neuf Afghans ont été condamnés mercredi à Paris à des peines allant de huit mois de prison avec sursis à six ans ferme et entre 1 000 et 30 000 euros d’amende. Ils étaient jugés pour appartenir à un groupe de passeurs faisant traverser la Manche à des migrants afin de rejoindre les côtes britanniques.
Âgés de 21 à 39 ans, neuf Afghans au casier vierge étaient jugés depuis le 11 avril au tribunal de Paris pour avoir contribué, à des degrés divers, à l’organisation du départ de 53 migrants sur des bateaux pneumatiques.
Accusés d’"aide au séjour irrégulier d'un étranger en France en bande organisée" et "association de malfaiteurs", ils ont été condamnés mercredi 19 avril à des peines allant de huit mois de prison avec sursis à six ans ferme.
Principalement originaires du Vietnam et d’Afghanistan, les exilés avaient embarqué sur des canots lors de quatre nuits en janvier, février et mars 2021, depuis les Dunes de la Slack, à Wimereux et Ambleteuse dans le Pas-de-Calais. Tous ont été secourus dans la Manche par les forces françaises ou anglaises.
Entre 1 500 et 4 000 euros pour traverser la Manche
Un homme de 30 ans, considéré comme ayant eu un "rôle prépondérant", s’est vu infliger la peine la plus lourde : il a écopé de six ans de prison, d’une amende de 30 000 euros et d’une interdiction définitive du territoire.
Pendant le procès, il a contesté, assisté d’un interprète, ce rôle de "chef", reconnaissant avoir "deux, trois fois" transporté et débarqué du matériel.
Le tribunal a aussi condamné trois autres hommes, dans le box avec lui, à cinq ans de prison et 25 000 euros d’amende (l’un d’eux avec six mois de sursis) et une interdiction définitive du territoire français. Ils ont été reconnus coupables d’avoir été "impliqués au premier plan" dans l’organisation des passages via la Manche.
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Les autres prévenus, libres sous contrôle judiciaire, dont deux étaient jugés en leur absence, ont été condamnés pour des rôles plus "secondaires".
La procureure avait pourtant requis des peines allant d'un an de prison avec sursis et 2 000 euros d'amende, à huit ans et 50 000 euros d'amende, parlant de prévenus qui ont "mis sciemment en danger des gens".
Évoquant un "réseau pyramidal" avec "une répartition évidente des rôles", elle a admis que "très peu de numéraire" avait été saisi dans l'enquête, mais elle a décrit une "activité particulièrement lucrative" avec un départ allant de "1 500 à 4 000 euros" par personne.
Environ 5 000 arrivées en Angleterre depuis janvier
Lors du procès, la défense a mis en avant le passé migratoire des accusés : ils ont fui leur pays en guerre et le régime taliban et étaient eux-mêmes dans l’extrême précarité.
"On vous fait croire que c'est un dossier très structuré, professionnel, extrêmement lucratif" mais "on est clairement sur de la délinquance de subsistance", a plaidé Me Alexia Gavini, parlant d'un "bénéfice relativement modeste".
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Malgré un renforcement constant des moyens de surveillance des côtes françaises, en très grande partie financée par Londres, les départs d'embarcations de migrants ne faiblissent pas sur la Manche. Quelque 52 000 migrants ont tenté en 2022 de rejoindre l'Angleterre depuis la France par la mer, selon les autorités françaises, qui ont fait état de cinq morts et quatre disparus pour l'année écoulée.
Depuis janvier, environ 5 000 personnes ont débarqué au Royaume-Uni. Selon un avocat représentant le ministère de l'Intérieur, cité par le journaliste Simon Jones, Londres s'attend à l'arrivée de 56 000 exilés via la Manche pour toute l'année 2023.